Etre loin de sa famille et de ses proches dans les moments difficiles

Cela fait deux mois et demi que je n’ai pas publié d’article sur L’Allée du monde, et je crois bien que c’est le plus longtemps que j’ai passé sans écrire pour ce blog depuis sa création. J’avais envie de prendre la plume pour vous dire pourquoi, et parce que je sais que ce que je vis, je ne suis pas la seule à le vivre. Et aussi, je dois l’admettre, parce que cela me fait du bien de mettre des mots dessus. Je n’ai jamais parlé de choses très personnelles sur le blog, et j’aimerais éviter de tomber dans le pathos. Alors j’ai simplement écrit cet article d’une seule traite, sans trop réfléchir, car j’ai pensé que c’est certainement de cette manière qu’il raisonnera le plus avec vous, et avec moi-même.

Cette impression de double vie 

Depuis quelques mois, j’ai l’impression de vivre une double vie qui a fini par me rattraper. La vie que je montre sur mes réseaux sociaux, et qui est pleine de photos d’Irlande, pays dans lequel j’ai eu la chance de vivre cette année, et de publications d’articles légers sur la vie à l’étranger. Cette vie et ces discussions ne sont pas un mirage, elles sont bien réelles et m’intéressent toujours autant, mais elles ne sont qu’une toute petite partie de ma vie dans son ensemble, qui est elle plus compliquée que cela depuis quelques temps déjà. Il y a quelques semaines, j’ai été rattrapée par tout ça : poster sur mes réseaux sociaux comme si de rien n’était, alors qu’en coulisse, ma vie était devenue bien difficile à gérer. Soudainement, j’ai eu l’impression de vivre une double vie, et cela est devenu un peu trop pour moi, alors j’ai pris du recul par rapport à mon blog. Je ne suis pas la seule blogueuse à parler de ce sujet précis : le décalage qui peut exister entre la vie réelle et ce que l’on affiche sur les réseaux sociaux. Il y a d’ailleurs des études qui montrent que passer du temps sur les réseaux sociaux peut être déprimant parce que les gens y affichent une vie parfaite face à laquelle on compare la sienne. On peut alors avoir cette impression, erronée, que tout va bien pour les autres, mais jamais dans notre vie. En même temps, je comprends aussi que tout le monde n’ai pas envie de parler des moments difficiles qu’ils traversent sur les réseaux sociaux, parce que c’est quelque chose de très intime, et qu’on a pas forcément envie de tout dire à tout le monde. Et j’imagine que pour certains influenceurs dont le travail est les réseaux sociaux, continuer comme si de rien n’était à poster sur Instagram ou Twitter permet justement de s’enfouir la tête dans le travail et de continuer à vivre un semblant de vie normale. Chacun fait du mieux qu’il peut, et si il y a bien une chose que j’ai apprise au travers de la situation difficile que je vis, c’est l’empathie : on ne sait jamais ce qu’il se passe réellement dans la vie et dans les tête des autres.

La distance géographique dans les moments difficiles 

Depuis plusieurs mois, je suis comme prise en étau entre deux petites tragédies personnelles. Mon mari souffre d’une forme sévère de maladie chronique pour laquelle nous cherchons un traitement efficace capable de le soulager depuis plus de deux ans. Deux ans à vivre au rythme de sa maladie, avec des hauts mais surtout des bas, des heures passées à l’hôpital, à courir dans tout le pays et au-delà pour rencontrer des spécialistes d’une maladie qui, si elle n’est, fort heureusement, plus fatale, rend le quotidien extrêmement difficile lorsqu’elle n’est pas maîtrisée, et peut conduire à des hospitalisations prolongées en série. Comme en ce moment, où il vient de passer 3 semaines à l’hôpital, et que j’ai partagé mon temps entre le travail (j’avais énormément de travail dans le cadre de mon activité de freelance en marketing ces dernières semaines) et les visites à l’hôpital. Et où, durant la longue convalescence qui s’annonce dans les semaines à venir, je prends beaucoup de choses à ma charge dans notre quotidien. Ceux qui sont atteints d’une maladie aux conséquences similaires ou qui accompagnent un malade – chronique ou pas – au quotidien le savent : c’est un parcours du combattant qui testent nos limites. Et dans ce cas, être loin des siens (dans mon cas loin de ses parents qui vivent dans une autre région d’Angleterre, ou de ma famille, qui vit en France) rend les choses encore plus difficiles. Heureusement il y a Skype, Whatsapp, Facetime, mais souvent, et sans que cela ne soit la faute de personne, la sensation de solitude nous tombe dessus comme un couperet. Parce que j’ai beau avoir la meilleure famille et les meilleurs amis du monde, une maladie chronique n’est pas qu’une parenthèse : elle dure dans le temps, dicte notre rythme de vie sur le long terme, et nos proches sont bien obligés de continuer à vivre leur vie et parfois, de s’occuper de leur propres situations difficiles. J’ai donc dû apprendre à assumer aussi cette situation seule, enfin plutôt à deux, avec mon mari. C’est notre vie, notre difficulté, et même si les mots réconfortants font du bien, il s’agit de notre épreuve à nous. Etrangement, je trouve qu’accepter cela fait du bien, même si cela ne rend pas les choses plus faciles au quotidien.
En parallèle, ma famille proche vit une situation très difficile depuis quelques mois en France. La fameuse distance, le sentiment de culpabilité bien connu de celui qui a quitté son pays et qui se trouve loin des siens pendant les drames de la vie. Le sentiment d’être écartelée entre ce qu’il se passe chez moi en Angleterre et qui a besoin de mon attention, et ce qu’il se passe dans mon chez moi d’origine, et où j’aimerais être plus présente.

Malgé tout, prendre soin de soi 

Très souvent dans mes articles, j’aime partager des conseils. Mais je ne sais pas si j’ai de vrais conseils à partager avec ceux qui vivent une situation similaire, et je pense que ces derniers seront d’accord : la clé est de tenir le coup en acceptant nos propres limites et en étant bienveillant avec nous-même. C’est à dire en s’accordant les pauses qui sont nécessaires afin de pouvoir continuer à épauler ceux qui en ont besoin. De tout faire pour trouver de la joie et éprouver de la gratitude pour les choses qui vont bien dans notre vie. Car souvent, même au fin fond des épreuves les plus difficiles, il existe des raisons d’éprouver de la gratitude. Un ami qui prend des nouvelles, le sourire de votre enfant, la nature qui vous entoure, peindre, faire un gâteau, observer les oiseaux dans un parc, la nature… Il existe toujours quelque chose de beau autour de nous, souvent dans les choses les plus infimes mais qui sont finalement si importantes quand on a plus le temps ou l’énergie d’organiser quoi que ce soit. Il est aussi important d’avoir dans son entourage une ou deux personnes (conjoint, ami, frère, soeur…) à qui l’on peut se confier. Pour créer une chaîne de solidarité ou chacun dispose du pilier nécessaire pour l’aider à faire face à cette situation difficile que la distance rend souvent encore plus dure à gérer.

Ces situations sont une réalité de la vie à l’étranger, et j’ai pensé que cet article pourrait mettre un peu de baume au coeur de ceux qui vivent une situation similaire. Donnez vous le temps, et prenez soin de vous aussi. Belles pensées à tous

Ecrit par :
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13 Commentaires

  • Hello Gabrielle, très bel article et surtout, bien réel en effet. Toutes mes pensées sont avec toi, courage à toi et je te dis à bientôt j’espère, prend soin de toi, bises, Violaine.

    • Merci beaucoup pour ton commentaire et ton soutien Violaine, et je suis vraiment désolée que tu aies aussi vécu ces difficultés. Bises et à très bientôt, prends soin de toi aussi, Gabrielle

  • Bonjour Gabrielle,
    Bon courage pour ces moments difficiles. Je sais exactement de quoi tu parles. L’impression parfois d’être tellement seule et de ne pas être assez présente pour ceux que l’on aime à cause de la distance surtout dans la maladie et la tristesse. Mais aussi l’incapacité de partager notre peine pour ne pas ajouter à celle des autres qui rend la situation encore plus difficile pour nous. et enfin là culpabilité que l’on ressent. Bon courage à toi et ton mari en espérant que bientôt une éclaircie apparaîtra dans votre ciel.

  • Bonjour Gabrielle
    Votre écriture est d une finesse rare elle nous permet de partager avec vous votre souffrance actuelle tout en ne pénétrant pas dans votre intimité
    Votre analyse des réseaux sociaux est intelligente et clairvoyante
    J espère que votre constat parlera à beaucoup
    Vous êtes courageuse et méritez vous aussi d être soutenue de près ou de loin par vos « proches « ( quel drôle de mot …) qui ont bien de la chance de vous avoir
    Merci beaucoup et bon chemin pour la suite de votre vie qui sera belle comme vous savez la regarder
    Bien à vous

  • Chère Gabrielle, tu as tout mon soutien et toute ma compréhension.
    Appeler la famille/amis pour dire que « ça ne va pas » nous met parfois dans une situation de culpabilité, on a peur d inquiéter ceux qu’ on aime et qui ne peuvent pas faire grand chose, n étant pas là physiquement. Alors on prend sur soi et on cherche au fond de notre sac à ressources les dernières miettes de courage..
    Qui a trouvé sur son lieu de vie une personne prête a accueillir ses confidences et ses états d âme a trouvé un trésor, je crois…
    Je te souhaite de trouver le tien, une amie qui peut te tenir la main , une oreille attentive quand tu n as plus envie d être forte..
    Nous sommes des « ami(e)s virtuel(le)s mais nous t envoyons nos meilleures pensées solidaires !

  • Hello Gabrielle ! Je suis désolée de lire que tu vis des moments difficiles et désolée de lire que ton mari est malade … J’espère que vous trouverez rapidement comment le soulager et vivre plus « normalement » malgré la maladie. J’ai aussi connu des périodes difficiles, la maladie et la perte de proches restés en France, le sentiment d’impuissance parce qu’on est loin et bien sûr, la culpabilité. J’ai mis beaucoup de temps à accepter la situation et à me dire que, c’est la vie que je me suis choisie et je ne me vois nul part ailleurs. J’apporte du soutien à mes proches autant que je le peux mais rentrer en France ne fera pas guérir un être cher ou ne le fera pas revenir. Je profite à fond quand je rentre et comme tu l’as si bien dit, je prends du temps pour moi. Plein de courage à toi pour la suite !

  • C’est très important ce que tu écris. Pour casser un peu l’image parfaite que tout le monde s’échine à montrer sur les réseaux sociaux.
    Pourtant, souvent sont les blogueuses qui « disparaissent » et on apprend après pourquoi : maladie, burn out, difficulté à trouver sa place entre l’image et son intérieur, décalage de ce qu’on montre et de ce qu’on vit…
    Cette franchise est pour moi indispensable, ça permet de mettre de l’humain, et l’humain n est pas fait (que) de photos parfaites instagramables !
    La dimension expat en plus a de quoi rendre dingue….
    Et puis pour toi même, extérioriser un peu ce qui te travaille peut aussi te faire du bien. Paradoxalement ce sont les réseaux sociaux qui peuvent servir d’une source d’énergie et de soutien particulièrement importants !
    Bref, tout ça pour dire que je t’envoie toutes mes amitiés en ces moment difficile !

  • Hello Gabrielle

    Je te soutien de tout coeur ❤️et vous souhaitent à tous les deux le meilleure en ce monde avec une guérison rapide pour ton mari j’ai vraiment bien apprécier ton analyse des réseaux sociaux. Nous avons également connus des moments difficile, je sors mois-même d’un cancer de la gorge, malgré que je suis non fumeur depuis plusieurs années (30) heureusement pour moi, je m’en suis sortis grâce au soutien de ma compagne . Il ya quelque jour d’ici nous avons créer notre société en Irlande et en somme très ravis une nouvelle vie commence… nous te souhaitons bon courage tous s’arrange un jour, bonne continuation nous te soutenons tous les deux … Claude et Titi de Bruxelles à + ‍‍‍

  • Bonjour Gabrielle, je pense que cet article résume très bien la situation émotionnelle que nous vivons, nous les expatriés. Un morceau de notre coeur restera à jamais dans notre pays d’origine où vivent amis et famille, puis l’autre partie dans notre pays d’accueil. Ne pas se voiler la face, ne pas faire un déni de ses émotions, ne pas culpabiliser, exterioser son mal-être… Tellement facile à dire et parfois tellement dur à faire. J’ai vécu cette situation et j’ai vu ma mère vivre cette situation il y a 18 ans. Bon courage dans cette épreuve, faites les choix que vous jugez les bons et surtout ne regrettez rien.

  • Hello Gabrielle,
    Ton article est très émouvant et je te remercie d’aborder avec authenticité les difficultés de la vie d’expatrié ainsi que le décalage qui existe bien souvent entre les réseaux sociaux et « behind the scene ».
    J’espère que les médecins vont trouver un traitement adapté à ton mari, qui puisse le soulager, et que la situation de ta famille va s’améliorer. Beaucoup de force et de courage à toi!

  • Chère Gabrielle, ton article nous touche forcément car il est très authentique et écrit très finement. Courage pour ce passage difficile. Tu n’as pas cité la lecture dans les choses qui peuvent nous permettre de trouver de l’energie et du réconfort et pourtant je te promet qu’un bon livre peut vraiment t’aider même si tu n’as le temps de lire que quelques minutes par jour. Je ne parle évidemment pas de la lecture des réseaux sociaux… Pour ceux-ci, il est peut être temps de faire un grand ménage et de ne garder que ceux qui te font rire (MadameForesti) ou ceux qui te font découvrir et apprendre des choses intéressantes (auteurs, artistes, photographes). On pense bien à toi !

  • Bonsoir Gabrielle,
    Je suis désolée de lire que ton mari a une maladie chronique et j’espère qu’un traitement va bientôt pouvoir le soulager. Ce que tu racontes avec tant de délicatesse et de pudeur est malheureusement ce que vivent la plupart des expatriés à un moment ou à un autre. Ce sentiment de ne pas être au bon endroit… quelque soit l’endroit où l’on est.
    Bon courage !

  • Coucou Gabrielle.

    Je m’étonnais de ne plus voir tes articles ou posts sur Internet et je comprends mieux. Il n’ y a rien de plus précieux que la vie. J’ignorais pour ton mari et je vous souhaite beaucoup de force dans ce combat. Je te souhaite aussi énormément de courage du côté de ta famille. Je pense à la façon dont tu dois essayer de gérer, de faire en sorte d’être là comme tu peux.

    Tu sais, j’ai quitté la Californie (“nonnn mais tu as quitté les palmiers et le soleil etc … why???) car j’ai connu deux décès qui m’ont fait bp souffrir et bp réfléchir sur notre situation. L’arrivée de la green card n’a rien arrangé sur l’après. Partir ou rester? Et la phrase “nooon mais vous avez la green card. Vous allez pas vous amuser à la perdre quand même?”. Je culpabilisais de l’avoir mais de ne pas avoir envie d’en profiter. J’avais une sorte de graal entre les doigts. Et puis j’ai pété un plomb avec les débuts de ma grossesse et j’ai tout remis en question. Mentalement, j’étais au bout du rouleau et à ce moment là, j’avais besoin de ma famille comme jamais. On a tout plaqué et depuis, je me sens revivre, je me sens entière et non plus coincée entre deux mondes. Adieu la green card. Cette vie n’était pas faite pour moi. Les beaux paysages, la vie “Cali dream”…c’était bien pour insta mais pas pour ce qui me faisait vivre à l’intérieur. Aujourd’hui, je me dis que mon bebe m’a remis sur MON bon chemin, celui qui me rend heureuse.

    Vivre loin de chez soi, de ses proches. Que c’est dur. Je n’ose imaginer avec un chéri malade. 3 semaines à l’hôpital…. quel enfer! Même si tu traverses une période plus que compliquée, je suis certaine que tu fais au mieux. Continue de te battre. Ne t’oublie pas non plus dans tout cela. On réfléchit tellement. Je pense fort à toi. Et si tu as besoin de papoter, n’hésite pas. Gros bisous ❤️

    Pauline

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